Diplomatie des normes : la France à la croisée des chemins

Le 15 mai 2025, le ministre français de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique Eric Lombard devait recevoir à Paris le vice-Premier ministre chinois He Lifeng. La normalisation volontaire figure à l’ordre du jour, et un protocole devait être signé pour formaliser cette relation partenariale franco-chinoise sur un certain nombre de thématiques stratégiques.
La normalisation est un soft power qui façonne le paysage économique mondial. Pourtant, en France, ce levier est sous-estimé, malgré le nouvel ordre international qui souligne l’urgence de préserver une souveraineté nationale : au classement des pays leaders dans l’animation de comités techniques à l’Organisation mondiale de normalisation (ISO) en 2024, la Chine se hisse à la 3e place, rétrogradant le Japon et la France aux 4e et 5e place, bien qu’en valeur absolue, l’Hexagone n’ait pas moins de secrétariats à tenir que les années précédentes.
Pour AFNOR, qui représente la France à l’ISO, la stratégie consistant à jouer le jeu d’un rapprochement avec la Chine est claire : mieux vaut dialoguer avec un standard-setter influent – et de plus en plus influent – plutôt que de devenir un standard-taker isolé. En 2026 d’ailleurs, la France accueillera à Paris les 170 pays de l’ISO réunis en assemblée générale. A l’heure où d’autres puissances érigent des barrières commerciales, les normes volontaires revendiquent leur rôle d’outil multilatéral et consensuel, facilitateur de confiance, d’échange et d’interopérabilité.

Classement des pays au sein de l’ISO en 2024, en nombre de secrétariats animés.
Les chiffres clés du baromètre international 2025 d’AFNOR
- La Chine gravit stratégiquement depuis vingt ans les échelons et se place pour la première fois à la 3e place des pays animateurs de comités ISO, derrière l’Allemagne et les Etats-Unis mais devant le Japon et la France. Au total, si l’on fait la moyenne des classements ISO et IEC (Commission électrotechnique internationale), la France occupe la 4e place.
- Dans le secteur agroalimentaire, la France reste leader avec 17 % des responsabilités (données 2023). La Chine, qui faisait jeu égal avec elle en 2022, continue sa progression mais reste pour l’instant à la 2ème place.
- A la troisième marche du podium dans le secteur des transports et de la logistique, l’offensive chinoise est encore plus visible, par exemple dans le domaine des ports, faisant écho à sa politique économique des « nouvelles routes de la soie ».