Normes volontaires : il va y avoir du sport

Fixer un cadre pour ne pas finir au tapis. Ces dernières années, le MMA connaît un développement fulgurant, accéléré par sa légalisation en France en 2020. En compétition, le Mixed Martial Art se pratique dans une « cage » : un grillage de forme octogonale, acteur à part entière de la discipline puisque les combattants peuvent s’en servir durant les confrontations. Au sol, un tapis semblable aux tatamis de judo amortit les chutes, souvent violentes.
Sauf qu’aujourd’hui, il n’existe aucune spécification technique concernant ces deux éléments indispensables à la discipline, constate Jean-René Savary, fondateur de SportCom Europe et fabriquant – entre autres – de cages de MMA. Or, le grillage doit répondre à des exigences bien précises, en se montrant à la fois suffisamment souple pour ne pas blesser les combattants, mais aussi suffisamment solide pour qu’ils ne passent pas à travers ! Et le sol doit assurer la sécurité des sportifs, parfois des athlètes de 130 kg projetés par leur adversaire, tout en permettant des déplacements rapides. Les chocs violents à la tête font partie des principaux risques.
Des normes volontaires pour combler un vide
Pour ce spécialiste, il existe donc un véritable vide juridique et normatif, qui ne protège personne : ni les sportifs, ni les organisateurs de combats, ni les collectivités qui souhaitent installer des cages de MMA, ni les fabricants d’équipements. « Concrètement, en cas d’accident grave, les assurances pourront refuser une indemnisation en prétextant l’absence de cadre. C’est un frein majeur au développement de la discipline », avance Jean-René Savary.
C’est pour cette raison que ce professionnel s’est tourné vers AFNOR il y a plusieurs mois, en demandant une réflexion sur le sujet. Un souhait exaucé : une commission de normalisation débute, réunissant plusieurs professionnels, la fédération, mais aussi des laboratoires experts, chargés de mener des calculs de résistance des différents matériaux en fonction des charges auxquelles ils sont soumis. Vous pouvez suivre l’avancement du projet en vous inscrivant à notre webinaire d’information du 12 juin 2025 ici.
La normalisation, pour éviter la sortie de piste
Côté pumptracks, les acteurs entendent passer à la vitesse supérieure. Avec leurs creux et leurs bosses, ces pistes asphaltées accueillent VTT, BMX, skateboards et autres trottinettes. En 2021, une AFNOR Spec avait déjà vu le jour, élaborée par les pionniers du secteur. À l’époque, la France comptait moins de 250 pistes. Six ans plus tard, le cap des 1 000 vient d’être dépassé !
« L’AFNOR Spec a clairement accéléré le développement de ce sport, constate Vincent Chrzanowski, cofondateur de HTracks, concepteur de pistes de pumptracks, que vous pouvez écouter dans cette vidéo au démarrage des travaux normatifs en 2019 du temps de son partenariat avec Hurricane, aujourd’hui révolu. La construction de pistes revient généralement aux communes. Le référentiel rassure les mairies, qui disposent d’un document sur lequel s’appuyer. » Car ces équipements ne sont pas sans risques. Des bosses trop rapprochées, des virages trop serrés, des pistes mal séparées, et c’est la chute ou la collision !
Vincent Chrzanowski poursuit : : « Il faut maintenant aller plus loin avec une norme volontaire, selon un principe d’équilibre : fixer des règles de sécurité strictes, mais laisser de la latitude aux concepteurs de pistes. Pas question de retrouver le même parcours de pumptrack partout en France ! Ce qui fait le sel de l’activité, c’est justement sa diversité. Les loopings ou les sauts par-dessus la piste feraient par exemple partie des aspects prohibés par la norme, car réservés aux professionnels et inadaptés aux enfants. Le coup d’envoi approche : les travaux de la commission de normalisation– une première mondiale sur le sujet – démarrent le 17 juin 2025. Vous pouvez suivre le webinaire d’information en vous inscrivant ici.
Normaliser pour ne pas se faire battre
Côté esport (prononcez « i-sport »
), l’enthousiasme est plus mesuré. Dans ce domaine récent et alternatif, le sujet normatif ne soulève pas autant les foules que la retransmission d’une compétition virtuelle de jeux vidéos, qui peut rassembler plusieurs millions de personnes partout dans le monde ! « Tout repose sur la définition même de l’esport résume Nicolas Besombes, sociologue de l’esport et maître de conférence à l’université Paris-Cité.
C’est une activité protéiforme, avec des jeux de combats, de course, de stratégie, de cartes ou encore de tirs, qui se pratiquent sur ordinateur, tablettes ou consoles. Il existe aussi des exergaming, contraction d’exercice et gaming, pour les jeux qui simulent les gestes sportifs… Bref, l’esport, c’est une identité propre. »
Or, certains pays, notamment asiatiques, accélèrent les travaux de normalisation sur le sujet. En toile de fond : la volonté de rapprocher ces activités du cadre sportif classique. Une offensive vue d’un mauvais œil en France. « L’esport entend défendre son indépendance, sans voir ses disciplines rattachées à une fédération existante, martèle Nicolas Besombes. Il faut donc porter notre voix ! Nous encourageons en revanche une normalisation volontaire qui faciliterait l’organisation des tournois, fixerait des règles en matière d’architecture numérique nécessaire, ou accompagnerait la diffusion. ».
Un combat normatif s’annonce donc. Vous pouvez vous inscrire à notre webinaire d’information sur le sujet programmé le 1er juillet 2025. Mais avant de monter sur le ring, les participants devront peut-être considérer une nouvelle norme… Car malgré son ancienneté, la boxe ne dispose d’aucune norme volontaire sur la conception des rings ! Un nouveau sujet pour AFNOR ?