Etablissements et services sociaux et médico-sociaux : comment réussir son évaluation qualité

AFNOR vous décrypte le nouveau référentiel qualité de la HAS pour l’évaluation quinquennale des établissements et services sociaux ou médico-sociaux.

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Etablissements et services sociaux et médico-sociaux

Vous dirigez ou exercez dans un établissement ou un service social ou médico-social (ESSMS) ? Vous devez vous soumettre à une évaluation quinquennale sur la base du nouveau référentiel qualité élaboré par la Haute autorité de santé et validé en mai 2022 par le COFRAC. Cette démarche comprend notamment 18 critères dits impératifs, sur 157 en tout. Comment s’assurer de cocher toutes les cases ? Décryptage d’un dispositif qualité pointilleux.

Etablissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), services d’aide à domicile, maisons d’accueil spécialisées, SAMU social, foyers de jeunes travailleurs, centres et foyers d’action éducative… En ce second semestre 2022, quelque 40 000 établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS) de France sont amenés à apprivoiser le nouveau référentiel d’évaluation mis au point par la Haute autorité de santé (HAS). En jeu : démontrer que la population à laquelle ils ont affaire (résidents, personnes à domicile) bénéficie d’un traitement de qualité, sur des critères pertinents, objectifs et actualisés. Une précaution incontournable depuis le scandale qui a secoué le monde des Ehpad (ex-maisons de retraite) au printemps 2022, à la sortie d’un livre à charge. Les contrôles menés dans 600 établissements depuis mars 2022 ont d’ailleurs entraîné trois saisines de la justice.

Le dispositif mis au point par la HAS, à fréquence quinquennale et non plus septennale, comporte trois méthodes d’évaluation, soumises à 157 critères, dont 18 impératifs, sur la base d’une grille d’entretien. AFNOR Certification, qui propose cette évaluation en tant qu’organisme référencé par la HAS sur le portail Synaé, vous les a détaillées lors d’un webinaire le 11 octobre 2022, que vous pouvez écouter en replay ici. Pour la première méthode, dite « accompagné-traceur », un entretien est mené avec au moins trois personnes accompagnées choisies par l’établissement ou le service, aux parcours et profils différents, puis avec un accompagnant au quotidien. Le but ? Constater l’expérience et la satisfaction de la personne par rapport à son accompagnement, sur sept thématiques. Si cette méthode ne doit respecter aucun des critères impératifs, ce n’est pas le cas des deux autres : « traceur-ciblé » et « audit système ».

Traceur-ciblé : un volet sensible et paradoxal

Soumis à 7 critères impératifs (5 pour les professionnels et 2 pour l’ESSMS), le « traceur-ciblé » concerne les droits fondamentaux et les libertés individuelles. Un entretien est mené avec les professionnels pour évaluer la mise en œuvre d’un processus ciblé et sa maîtrise ; et un autre avec la gouvernance pour mesurer l’organisation et les moyens associés. « Ce volet de l’évaluation s’avère sensible, alerte Pierre Linden, évaluateur. Par exemple pour la liberté d’aller et de venir. Selon le nouveau référentiel, la famille de la personne accompagnée peut aussi être consultée. Or ce qui relève de la sécurité ou de la liberté peut être paradoxal. Comment est-ce encadré sur le plan réglementaire et mis en œuvre au quotidien ? Il faut au moins une réponse institutionnelle homogène. Cela passe par la formation du personnel, le processus d’intégration, la charte d’équipe, etc. » De même, pour la liberté d’opinion, le droit à l’image ou encore de l’exercice des droits et libertés, l’évaluateur examine les chartes éthique et de bientraitance, le RGPD, le formulaire de droit à l’image, les règles de confidentialité, l’hébergement des données, le livret d’accueil, etc.

Audit système : des situations complexes

Photo Pierre Linden

Pierre Linden est évaluateur qualité en ESSMS, notamment pour AFNOR Certification ©DR

L’audit système, qui évalue la manière dont l’établissement organise sa politique RH, sa démarche qualité et la gestion des risques, compte 11 critères impératifs. Un entretien est mené avec la gouvernance (8 critères), un autre avec les professionnels de terrain (3 critères). Une grille objective qui laisse quand même une certaine place à l’interprétation : « En cas d’événement indésirable, de plainte ou de réclamation, le processus comporte une démarche structurée sur le signalement, le traitement et les actions déployées. Mais quand on signale un fait, est-ce de la délation ? Et si l’établissement avance qu’il n’y a eu aucune maltraitance, il doit démontrer que les situations de maltraitance supposée ont bien été remontées et vérifiées au préalable », illustre Pierre Linden. L’évaluateur prend un autre exemple : « Le tutoiement des personnes accompagnées ou l’usage d’un surnom pose question. Cela peut être perçu comme dégradant et par conséquent, au regard des textes, être assimilé à une forme de maltraitance. Mais si le résident l’autorise ou si on démontre que l’équipe accompagnante y a réfléchi dans le cadre de référence, cela change la donne, puisque cela dépasse la seule sensibilité personnelle. » À noter : consulter une structure régionale d’appui (SRA) qui forme et sensibilise, permet un retour d’expérience, notamment en cas d’événement indésirable grave.

Identifier ses points forts

Si l’évaluateur (appelé « intervenant ») cote un critère impératif en dessous de 4, il doit remplir une « fiche critère impératif », intégrée au rapport d’évaluation. L’ESSMS doit alors construire un plan d’action annexé à la fiche et l’évaluation se poursuit, dans la rigueur et la bienveillance : la gouvernance est-elle informée des événements justifiant une cotation 1, 2 ou 3 ? A-t-elle analysé les causes en jeu ? A-t-elle identifié les mesures d’amélioration nécessaires ? Des évaluations ou un suivi sont-ils prévus ? « Formation, charte d’équipe, etc… L’établissement doit avoir un maximum d’arguments pour qu’un évaluateur cote au-dessus de 3. Franchir la frontière entre 4 et 3 reste délicat pour ce dernier, confesse Pierre Linden. Une chose est sûre : l’établissement a tout intérêt à s’autoévaluer en amont pour s’approprier le référentiel, pouvoir répondre aux questions, puis mettre des actions en place. Par exemple, comment la liberté d’aller et de venir se traduit-elle exactement chez lui ? Les réponses varient beaucoup en l’absence de cadre. » Astuce à retenir : interrogez-vous sur vos points forts dès le départ. Vous saurez ainsi ce sur quoi vous voulez insister et pourrez partager des bonnes pratiques.

Devenez évaluateur ou évaluatrice

Avec ses 9 thématiques et 157 critères, dont 18 impératifs, et ses 4 outils spécifiques (accompagné-traceur, traceur-ciblé, audit système et une grille spécifique pour le conseil de vie sociale), le nouveau référentiel qualité d’évaluation des ESSMS nécessite une lecture approfondie et explicative. Tous les organismes d’évaluation devront être de nouveau accrédités par le COFRAC selon la norme EN ISO/IEC 17020. Les évaluateurs, qu’ils soient externes ou internes (directeurs d’établissements, cadres et autres professionnels des ESSMS), ont donc tout intérêt à se former. Les arrêtés de programmation pluriannuelle pour la période du 1er juillet 2023 au 31 décembre 2027 étant déjà sortis, c’est maintenant qu’il faut se lancer ! AFNOR Compétences vous propose plusieurs modules à découvrir ici, assortis des explications de la formatrice Cathy Barret-Beaumard.

Les 9 thématiques du référentiel

  • Bientraitance éthique
  • Droits de la personne accompagnée
  • Expression et participation de la personne accompagnée
  • Co-construction et personnalisation du projet d’accompagnement
  • Accompagnement à la santé
  • Accompagnement à l’autonomie
  • Continuité et fluidité des parcours
  • Politique ressources humaines
  • Démarche qualité et gestion des risques